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Fils RSS    [VERSION PDF]      Par Caroline Bruens | le 2013-09-19

DEMAIN EST UN AUTRE JOUR!

Le deuil après le 4e mois

C’est la douche écossaise ! Démarrer une campagne de recrutement de membres pour l'Académie, se réjouir avec les tout-petits, participer aux manifestations publiques, voir la vie dans toute sa splendeur et apprivoiser simultanément et en alternance, une profonde dans chacune des situations. Comprendre qu’on a encore sa compétence, mais qu'on vit désormais dans un état de manque car, le deuil, au cours des 2e et 3e mois suivant le décès, c’est d’être confronté à une réalité plus cruelle, plus dure… si c'est possible… C’est de réaliser que c’est vraiment vrai … il ne reviendra jamais plus ! C’est la frontière du vrai désespoir.

On a beau avoir intellectualisé et compris qu’il est et qu’il sera toujours là, présent, ici et maintenant et qu’il se retrouve dans chaque parcelle de l’univers, je dois vous confier que pour moi, ce n’est pas assez, ce n’est pas suffisant, c’est trop abstrait. Je veux plus ! Il me manque. C’est sa présence, sa voix, son odeur, sa conversation qui me manquent. Tout de lui me manque. Heureusement, il y a le travail, heureusement il y a l’Académie.

« Tu dois vivre au présent et tourner la page » me disent plusieurs personnes et ils sont convaincus que c’est la chose à faire. Ils ont sûrement raison. Pour ma part, je veux bien vivre au présent, je ne sais d’ailleurs pas comment faire autrement. Mais, tourner la page, non, je ne le veux pas, je continue à écrire l’histoire, notre histoire. Je pense que Louis est bien là où il est et qu’il veille sur nous tous. Qu’il est content de voir que je profite énormément de votre présence, de votre patience, de votre tendresse et de l’affection que vous me prodiguez. D’ailleurs vos attentions et votre dévouement à mon égard me touchent. Vous êtes formidables, si discrets, si fins, si sensibles et vous comprenez mon désir de garder mon Louis vivant. Pour les nouveaux artistes, et bien, vous ferez sa connaissance à travers nous tous qui l’aimions et qui nous souvenons… c'est merveilleux l’Histoire.

Je suis heureuse de comprendre que je ne fais pas partie de la cohorte qui téléphone aux autres à 3 heures du matin, heureuse de réaliser que je fais partie de ceux qui lisent et qui écrivent… et qui, grand bien vous fasse, ne font pas lire, aux autres, toutes leurs élucubrations. Redéfinir le sens d’expressions pourtant simples telles : « À chaque jour suffit sa peine ! » « Un jour à la fois…» « Avec le temps va … et tutti frutti… ». Vous savez, tout ça, c'est l'insumonrtable... que je surmonte et qui n'est pas encore assez. La vérité c’est d’admettre, hors de tout doute, que la seule personne dont je ne voulais pas me passer est partie à tout jamais et que même les personnes qui nous sont indispensables partent contre toute notre volonté.

Il y a quelques jours je me visualisais sous forme de saumon. Je vivais en remontant le courant, je vivais à contrecourant, à contresens, c’était difficile et je me sentais fatiguée. Après réflexion et humour, je me suis tout simplement dit que je n’étais pas un saumon, que j’étais un être humain responsable et conscient qui devait affronter les difficultés inhérentes à sa condition et que c’était ma réalité de vie. Je ne suis pas un poisson… pas très difficile à comprendre comme concept. Et hop, fini le cirque, très souvent on veut croire toute sorte d’histoire et on se fabrique un tout un cirque pour éviter d’être confronté à la réalité.

J’ai compris, et il me fallait le comprendre, que l’expression « pour toujours » signifie désormais « plus jamais ». Qu’il y a des abimes infinis en chacun de nous, qu’il y a « un monde infiniment grand » et « un univers infiniment petit » et de savoir que ça existe est rassurant et qu’il est fascinant de s’y perdre.

Le deuil après 100 jours, c’est d’admettre l’inéluctable et l’irréversible : La nouvelle réalité c’est qu’on va rester ici et continuer à vivre autrement car l’autre est parti et que rien ne sera plus pareil, qu’on ne peut retourner en arrière et surtout qu’il faut l’accepter. Il n’y a pas de plan B ou on avait tout prévu. Nous étions si heureux, on avait encore dépassé une autre chirurgie, on présentait le gala ACADEMIA XXI - 2013 et le pire était derrière nous. Et d’un seul coup il n’y a plus de nous et la grande épreuve m’est réservée… à moi toute seule ! Et elle est devant moi. Je dois composer avec un nouveau vocabulaire et s’adapter – Louis aurait dit : l’adaptation est une preuve d’intelligence  – Donc je disais, on doit s’adapter au nouveau vocabulaire, Louis est devenu un corps, une dépouille et on l'appelle le défunt ou la personne décédée, puis le monde du corps et de la dépouille est déjà révolu et on passe aux : veuve, conjoint survivant, sexisme, insomnies et famille. La famille naturelle, la famille reconstituée, la famille élargie… et la grande famille de l’Académie. Quel bonheur! Que le sommeil me boude qu’il semble parti avec lui, que de nouvelles personnes sont devenues mon oxygène et mon eau, que je réalise le privilège d’avoir un boulot unique et différent, que j’apprécie d’avoir un travail titanesque à abattre : faire connaître les artistes en arts visuels avec une nouvelle énergie vitale, une énergie transformée. Pour m’adapter… je m’adapte… Bon signe dirait Louis!

J’ai compris que le mot famille, pour une fille unique comme moi, a une signification différente. Les membres de l’Académie font partie de la famille et notre entreprise est devenue plus qu’un tremplin pour toute une communauté d’artistes sensibles et attentionnés. Ça, je le savais déjà ! Maintenant ce sont mes cellules qui le savent elles aussi. Constater, réaliser et intégrer le fait que des amis, pourtant étrangers, sont devenus des sœurs et des frères, des personnes de bons conseils à qui on peut se confier qui comprennent et partagent la tragédie qui nous frappe qui savent qu’on est en train de rebondir, ça c’est tout un cadeau de la vie.

Louis, mon guerrier de la paix, tu es un homme bon, loyal et digne. De te savoir dans la lumière, et débarrassé de toute douleur est d’un grand réconfort. Je désire aujourd’hui transmettre à tout le monde la philosophie que tu tenais de ton père, une philosophie que vous appliquiez dans votre quotidien alors que vous étiez prisonniers des camps de la mort. Durant 25 ans tu me l’as transmise à ton tour, jour après jour, inlassablement. Une petite phrase pourtant si simple et pourtant si lourde de sens très difficile à appliquer : DEMAIN EST UN AUTRE JOUR.

C’est grâce à cette petite phrase que tu étais si fort, si courageux et si brave face à l’adversité. Pour moi, aujourd’hui elle veut aussi dire par contre : Demain est un autre jour… mais un jour sans toi. Je sais que dans mon cœur, oui, «Tu étais le bon Dieu». (Chanson de Jacques Brel, interprétée lors du gala et des funérailles de Louis Bruens Si j’étais le bon Dieu).

Mon amant, mon époux, mon mentor, mon meilleur ami, mon double. Pouvais-je perdre plus que cela d’un seul coup ? Je ne le crois pas. Je continue à t’aimer et j’ai commencé à vivre un jour à la fois, mais sans toi… Comme quoi vivre sans toi est possible et que c’est vraiment un autre jour où tout peut arriver. Soupers amicaux, expositions, symposiums, rencontres de travail, administration, construction, développement de l’Académie, oui la vie continue, mais c’est difficile.

Au moins tu es libre, tu es libéré des douleurs, toi le libre penseur et le « franc-parleur », le chrononaute, l’écrivain spatiotemporel. Tu savais certainement que tu partirais avant moi que tu quitterais, dans un moment de gloire, cette trop petite planète. Tu en connaissais bien des mystères et des secrets. Il y a vingt-cinq ans déjà tu parlais des mémoires conservées dans le cristal etc. Nous discutions de tellement de choses, tu m’as donné tellement d’amour, tu veillais sur moi. Un poème m’est venu à l’esprit, je l'ai écrit il y a quelques temps et je te l’offre... et je vous l’offre... CLIQUEZ ICI POUR LIRE LE POÈME

Solange St-Pierre a illustré le texte de Louis et de son bidule spatio-temporel. Diane Forest a, par la suite, dessiné sa version du texte, Louis en a bien ri.

 

 

 

 


9 Réaction(s) Écrivez vos réactions à ce texte »

Jean-Pierre Neveu
2013-09-20 @ 08:48:11

Rien ne m'étonne de t'avoir lu ce matin...ton amour si grand pour Louis...ta très profonde tristesse...ta force intérieure tout comme ta sensibilité qui t'habite et...l'intelligence que tu découvres à surmonter l'insurmontable. Cependant ce qui m'étonne est comment tu réussis à transmuter ta souffrance en une force peu commune...... en si peu de temps. Caroline, je ne suis pas un médium pour avancer ceci, mais ton Louis est manifestement en toi car tu n'as qu'a juste vivre le deuil physique de sa personne... il cohabite en toi car je sens qu'il ta transfusé son énergie à tout les niveaux de son être pour faire de toi Caroline un être encore plus en force et en intelligence que par le passé. Vous avez fusionné tout les deux et c'est pas donné à tout le monde de connaître cela, il est vraiment vivant en toi et à des niveaux supérieurs aussi.....Il est selon moi encore plus proche de toi que par le passé, et je vois qu'il parle au travers toi Caroline...Quel philosophe, et par toi, tu as décuplé son énergie qui transpire dans tes textes. Oui! Louis va t'amener à réussir le passage de ton deuil, si ce n'est pas fait à date...pour devenir encore plus forte car tu as maintenant en toi par lui, un consultant instantané, un régénérateur d'énergie...et un protecteur sous une autre forme. Caroline, Louis est là en toi pour rester en toi, à tes côtés, pourquoi faudrait-il tourner la page comme certains disent... et passer à autres choses. Non!Tu devras tout de même trouver le moyen d'adapter à ta nouvelle vie, ces deux directives ne donnant pas plus d'importance aux souvenirs que la banalisation du deuil en se défonçant dans des projets menés par le désir de l'oubli... Considère-toi maintenait Caroline comme une femme encore plus accomplie sur laquelle davantage de respect te seront du par ta force et ton intelligence accrues suivant l'exemple que tu nous inspires dans ton épreuve...Merci de nous avoir partager ce que tu vis, cela m'enseigne...

Jean-Pierre xx

Lyse Marsan & Daniel Perron
2013-09-20 @ 08:59:19

Merci Caroline de ce partage avec nous. à très bientôt. Daniel et Lyse

cathy Martin
2013-09-20 @ 09:51:07

Caroline, J'arrive au bureau ce matin, je me prépare à un tourbillon de milliers de petites choses à organiser pour livrer notre Rêves d'automne la semaine prochaine. Je vois ton texte "Demain est un autre jour", je m'arrête et je te vois à travers tes mots et je revois Louis, l'émotion me "pogne", comme cela doit être difficile de vivre l'absence de l'autre. L'image qui me vient de toi, est celle d'une belle grande femme, sur un grand voilier qui vogue vers de nouveaux horizons, l'oeil tourné vers le large, menant encore plus loin ce vaisseau de l'Art ! Bon vent Caroline, tes voiles seront toujours gonflées de l'admiration et de la tendresse des artistes et des acteurs du monde des arts. Bisous.

Jocelyn Mornesau
2013-09-20 @ 10:00:23

Ma chère Caroline, Tu as peint avec tes mots ce texte si touchant. Je te sens fragile, inquiète, mais forte en même temps. Tu as pris le temps de nous composer un poème. Généreuse Caroline. Sois courageuse, continue ta route et regarde toutes ces formes et ces couleurs que t'offre l'Univers. Comme Louis, tu laisses toi aussi des pas dans l'univers des nos vies d'artistes. Merci!

dinah angers
2013-09-20 @ 18:37:15

regarder au dedans et avoir le courage de se livrer sur une toile regarder au dedans et avoir le courage de se livrer dans une poésie se regarder au dedans et vivre et revivre, encore et encore, jour après jour continuer l'oeuvre, l'oeuvre d'une vie, de votre vie à vous deux, mais qui se continue sans l'autre. Mes hommages, vous êtes vraiment une très grande dame, 'a l'image de se grand monsieur qu'était Louis

Yvon Chartrand
2013-09-20 @ 23:08:36

Ce texte nous amène à une belle proximité avec toi. Ce partage nous montre toute cette sensibilité qui a animée tes derniers 100 jours. Cette grande tendresse possède la plus belle déclinaison du prénom LOUIS, qui compte aussi cinq lettres (comme par hasard) du mot AMOUR. Je comprends que les deux sont indissociables et que la symbiose qui vous unie s'étend bien au delà de votre fil d'Ariane. Après ce délai est-il trop tôt pour parler de cet héritage artistique? Il faudra bien qu'à court terme, qu'un livre d'art rendre hommage à vous deux et à cette union artistique qui nous a amenée tant de coloris. Votre propre vision de l'art doit servir et laissée une trace dans notre histoire artistique Québécoise. Je crois que plusieurs artistes de notre académie participeraient à ce geste de continuité de cette passion toujours vivante de l'art.

Ginette Ash
2013-09-21 @ 01:58:08

Bonjour Caroline, Merci pour ce touchant témoignage rempli d'un amour si fort envers votre cher Louis et envers tous les artistes de l'Académie. Merci de votre partage intime rempli de vérité, de grande sensibilité, de fragilité, de tristesse et d'une générosité sans bornes à nous faire partager ce que vous ressentez et ce que vous vivez depuis quatre mois. C'est une belle leçon de vie que vous m'enseigner! Votre texte et votre poésie me font réfléchir et me "pogne" au cœur et quelques larmes coulent sur mes joues. Malgré votre grande peine, votre fragilité, vous êtes une Grande Dame accomplie avec une force de caractère, qui est de plus en plus vivante en vous, parce que l'âme de Louis est en vous, dans vos veines, dans toutes les pores de votre peau et dans votre cœur. Louis va toujours continuer à vous protéger, à vous guider et à vous aimer.

Je vous souhaite bon courage et bonne chance. Ne lâchez surtout pas, car nous, les artistes, avons besoin de vous et nous sommes de tout cœur avec vous. Continuez votre belle mission que vous avez bâtie tous les deux avec amour et continuez à travailler avec la passion et le dévouement que l'on vous connait pour l'Académie et pour les artistes qui vous aiment et vous respectent. Avec tout mon respect, je vous admire et je vous embrasse. Ginette Ash

Nicole Proulx
2013-09-22 @ 07:38:45

Je remercie le poète peintre que tu es mettant la couleur sur les mots. La symbiose avec Louis en est la trace. Aujourd'hui tu es lancée dans un nouvel univers avec tous ses héritages. Je suis remplie de force par cet amour que tu portes aux artistes. Tu es la première personne que je rencontre qui estime aussi fortement notre vécu. Je reconnais ta grandeur d'âme et j'y porte un grand respect.XX

Lise B Tétreault
2013-09-27 @ 04:18:39

Je ne pouvais aller me coucher sans te lire et ressentir ta tristesse mais aussi ta force et ton espoir dans la vie. Louis a su te transmettre, nous transmettre ses qualités. Merci de partager tes réflections avec nous espérant que ce sera un baume pour toi. Nous sommes un avec l'univers. Bisous

 

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